Pamir, oubliés sur le toit du monde

Culture

Par Laetitia Santos

Posté le 28 septembre 2012

Des images hivernales superbes qui témoignent de la rudesse de vie sur le plateau du Pamir en Afghanistan où quelques centaines de nomades Kirghizes afghans vivent comme hors du temps.


Le Pamir, c’est l’extrémité orientale du corridor du Wakhan en Afghanistan, une terre désertique qui s’élève à plus de 4200 mètres d’altitude et dont l’isolement lui a valu d’être tenu à l’écart des événements dramatiques qui se sont déroulés ces dernières années à l’échelle nationale.

Que les trekkeurs et les rêveurs y étanchent leur soif d’immensité, rien d’étonnant dans ce décor lunaire encastré au coeur des plus hautes montagnes du globe. Mais comment une communauté a-t-elle pu y avoir élu domicile alors qu’il n’y a ni route, ni école, ni hôpital et que le froid glacial saisit même les plus endurcis ? C’est ce que Matthieu Paley et sa femme Mareile ont tenté de comprendre en se rendant jusque sur ces terres désolées où vivent 800 âmes qui n’avaient pas été visitées par un occidental depuis 1972...

Lui a photographié, elle a écrit. De cette fusion du texte et des images est né un ouvrage à l’esthétique minérale qui rend hommage à un peuple ancestral méconnu, les Kirghizes afghans. Peaux burinées, couches de fripes superposées, regards translucides, mains épaissies par les travaux manuels, chaque gros plan transpire la pénibilité du quotidien et l’humanité sincère des peuples qui vivent en communauté et n’ont pas perdu le sens du mot solidarité.

Le nez flanqué dans ces pages, à observer tantôt les étendues de neige immaculée, tantôt les cimes édentées à la roche étonnamment colorée, on semblerait presque percevoir le silence de ces contrées. Il nous faut rentrer à l’intérieur des yourtes, là où la chaleur du feu réchauffe les coeurs, pour saisir les rires et les voix, capter la douceur d’une pause thé dans cette vie austère, vivre des instants plus paisibles comme l’allaitement de cet enfant ou joyeusement frénétiques comme la cérémonie de mariage de cette jeune fille entourée de femmes vêtues de rouge et de fleurs qui se chargent de sa mise en beauté. Parfois, des flous poétiques troublent le regard et nous enseignent qu’il n’est pas rare que l’opium ici vienne détendre les esprits.

Les Kirghizes afghans sont bien là quelque part, derniers représentants d’un mode de vie et d’une culture comme il n’en existe que peu dorénavant, s’accommodant d’une vie en pleine nature aussi magnifique que cruelle et qui semble avoir tant à nous apprendre - ou du moins à nous rappeler... - sur les fondamentaux de la vie et la certitude de la mort...