Dian Fossey, « la femme qui vivait seule dans la montagne»

Société

Par Cécile Le Maitre

Posté le 17 janvier 2014

Dian Fossey fait partie des gens que l'on admire. Parce qu'elle avait un rêve et est partie loin, très loin de l'Amérique qui l'a vu grandir, pour le réaliser. Parce que son engagement et son combat pour connaître et protéger ceux que "King Kong" avait associés à des monstres dans l'imaginaire collectif, ont toujours un sens des années après sa mort. Portrait d'une femme dans la brume des montagnes du Rwanda.


L’appel de l’Afrique

Née en Californie en 1932, Dian Fossey a 31 ans lorsqu’elle se rend pour la première fois en Afrique. Un voyage touristique à travers le Kenya, la Tanzanie, le Congo (Zaïre), l’Ouganda et le Zimbabwe (Rhodésie). C’est au cours ce périple, au Congo, qu’elle fait sa première rencontre avec les gorilles des montagnes brumeuses de Kabara. Dian est immédiatement fascinée par ces grands singes à l’allure imposante mais dont le comportement dégage une certaine timidité.

Passionnée par les animaux depuis son plus jeune âge, Dian Fossey se destinait au métier de vétérinaire. Mais elle échoue dans cette voie et devient ergothérapeute. A son retour d’Afrique, la jeune femme réintègre la clinique où elle travaillait jusqu’alors, afin de rembourser le prêt contracté pour partir en Afrique, et peut-être pouvoir repartir un jour. En attendant ce moment, elle publie plusieurs articles et des photos de son premier voyage, gardant dans un coin de sa tête l’image des gorilles de Kabara.

Des gorilles dans la tête

Au printemps 1966, près de deux ans après son voyage, elle assiste à une conférence du paléontologue et primatologue kenyan Louis Leakey, dont elle avait fait la connaissance en Tanzanie. À l’époque, ils avaient échangé au sujet des études menées sur les grands singes, et notamment des travaux de Jane Goodall avec les chimpanzés. À l’occasion de cette conférence, Dian montre ses articles au professeur Leakey. Ce dernier souligne l’intérêt de réaliser une étude de terrain sur les gorilles des montagnes. Cette idée qui germait dans l’esprit de Dian Fossey depuis des mois, va enfin prendre vie avec le soutien du professeur Leakey.

En décembre 1966, Dian repart pour l’Afrique. Elle installe un premier camp d’observation dans les montagnes Virunga, côté Congo. Mais après six mois, elle est forcée de quitter ce territoire en raison de troubles politiques, et passe côté rwandais dans le Parc National des Volcans. C’est entre les pentes des Monts Karisimbi et Visoke, que Dian Fossey établit son camp, le centre de recherches Karisoke.

Vivre avec les gorilles

Dian Fossey va vivre plus de quinze ans aux côtés des gorilles des montagnes Virunga. Pour gagner leur confiance et les approcher de plus près, Dian s’écarte des méthodes enseignées dans les manuels d’éthologie et de zoologie : s’asseoir et observer. Elle a le sentiment qu’une telle attitude risque davantage de susciter la méfiance chez les grands singes. Elle tente alors d’attiser leur curiosité en imitant leur comportement et leurs vocalises. En quelque mois, la présence de Dian est acceptée par plusieurs groupes de gorilles. Sur des photos publiées en 1970 par le magazine National Geographic, on la voit au contact de gorilles, dans des situations de promiscuité et d’échanges, qui vont contribuer à détruire le mythe du gorille tueur d’hommes.

En réalité c’est bien l’homme qui menace le gorille et non l’inverse. En 1970, Dian Fossey écrit dans un article : « à moins d’efforts plus coordonnés et davantage de détermination pour sauver le gorille des montagnes, cette espèce est vouée à disparaître dans les deux ou trois prochaines décennies ». À l’époque, on ne dénombre déjà plus que quelques centaines d’individus. Ceux-ci sont théoriquement protégés mais leur survie est constamment menacée par le braconnage (qui ne les vise pas nécessairement mais dont ils sont souvent des victimes collatérales) et les éleveurs qui mènent leurs troupeaux brouter dans les zones réservées aux gorilles. Dian Fossey est dans un conflit permanent avec les braconniers et les éleveurs. En 1977, un gorille qu’elle avait nommé Digit, et dont elle était très proche, est tué par des braconniers en défendant les membres de son groupe. Dian entre alors dans une guerre ouverte avec ces derniers, qu’elle tente d’intimider et de punir par ses propres moyens.

L’icône et l’héritage

Au Rwanda on l’appellait Nyiramachabelli, « la femme qui vit seule dans la montagne ». Un nom qui évoque le sacrifice fait par Dian Fossey pour étudier et protéger les gorilles. Le combat et la vie de Dian s’achèvent atrocement en décembre 1985. Elle est découverte dans sa hutte le crâne fendu en deux à coups de machettes. L’assassin n’a jamais été retrouvé. Elle est enterrée auprès de ses gorilles. Cette fin tragique contribue à faire de Dian Fossey une icône de la lutte pour la préservation d’espèces menacées. Avec le film Gorilles dans la brume, qui sort quelques années après sa mort, le grand public découvre et se passionne pour la vie de la zoologue américaine auprès des gorilles de Kabara.

Aujourd’hui, plusieurs associations poursuivent le combat pour la préservation des gorilles des montagnes. Si l’espèce ne s’est pas éteinte, comme l’avait craint Dian Fossey, c’est grâce à l’héritage qu’elle a transmis : sa connaissance scientifique et sa détermination. C’est le Fond international Dian Fossey pour les gorilles qui gère aujourd’hui le centre de recherches Karisoke. Grâce au travail du Fond, qui associe développement des communautés locales et préservation de l’espèce et de l’environnement, la population est davantage impliquée dans le maintien de cet héritage, qui va de pair avec une amélioration des conditions de vie des habitants des montagnes Virunga et leur éducation.

Le tourisme, s’il est pratiqué de manière responsable évidemment, est également un moyen de faire vivre l’héritage de Dian Fossey et de protéger les grands singes. Babel a ainsi sélectionné pour vous quelques circuits pour aller à la rencontre des gorilles des montagnes, dans le respect de l’espèce, de l’environnement et des populations.