Jean-Christophe Victor a joué sa dernière carte

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Par Laetitia Santos

Posté le 29 décembre 2016

Jean-Christophe Victor, ethnologue français et présentateur de l’émission « Le Dessous des Cartes » sur Arte, s’en est allé ce mercredi 28 décembre 2016 à l’âge de 69 ans. Cet expert en géopolitique et pédagogue incroyable que nous avions écouté avec admiration lors d’une conférence donnée l’an passé au Festival du Grand Bivouac d’Albertville s’en va, nous laissant bien seuls face à la complexité du monde d’aujourd’hui qu’il avait pour don de mettre à la portée de n’importe qui...


Il n’était autre que le fils de Paul-Émile Victor, fondateur des Expéditions Polaires françaises. Pas étonnant alors qu’il ait vécu animé toute sa vie par la passion du voyage, la connaissance de ce monde et sa préservation face aux changements climatiques.

Il avait exploré les moindres recoins du globe et de l’Asie tout particulièrement, qu’il aimait tant comme en témoignage son dernier ouvrage publié chez Arte Editions Tallandier, Le Dessous des cartes. Asie. Itinéraires géopolitiques. Après un diplôme de chinois en poche délivré par l’Institut National des Langues et Civilisations Orientales, il avait obtenu un poste diplomatique à Kaboul, en Afghanistan avant de rejoindre pour neuf ans le centre d’analyse et de prévention du ministère des affaires étrangères en 1980. En 1992, il crée le Lépac, Laboratoire d’Études Politiques et d’Analyses Cartographiques avec qui il travaillera à l’élaboration de son émission à succès pour Arte, Le Dessous des Cartes. Son objectif était clair : faire de la pédagogie pour éduquer et favoriser le vivre-ensemble.

Les cartes, il « était tombé dedans tout petit. Il y en avait partout à la maison. J’ai eu la chance d’avoir comme père un homme merveilleux. On a eu des moments extraordinaires. Heureusement, d’ailleurs, car on ne le voyait pas beaucoup. »

Avec un style posé, chaleureux, une voix profonde et convaincante, il simplifiait la complexité du monde, cassait les préjugés à coups de cartes animées, de graphiques colorés, et faisait comprendre au plus grand nombre chaque relation entre les États, n’importe quel conflit aussi complexe soit-il, comme celui du Moyen-Orient sur lequel il a tant planché, toutes données et tendances s’inscrivant dans notre monde contemporain. Nombreux enseignants s’appuyaient sur ses démonstrations pour animer leur classe.

Amoureux de la Birmanie, du Laos, mais aussi des pôles, il savait abandonner son habituel ton factuel pour prendre position lorsque ça le devenait nécessaire comme lors du conflit en Bosnie ou au Kosovo, au moment du génocide rwandais, vis-à-vis de la politique menée par Israël en Palestine ou encore face à celle de Bush en Irak : « Il faut tout de même parfois réagir. Il ne s’agit pas d’être géopolitiquement correct à tout prix ! »

Lui, c’était Jean-Christophe Victor, humaniste parti bien trop tôt et qui nous laisse éplorés face à un monde qui a bien besoin de cette compréhension magnifique que l’Homme d’engagement s’efforçait de transmettre pour en améliorer sa bonne marche. On lui souhaite bonne route dans son dernier voyage...