Gouffre du Padirac : Le diable s’habille en Padirac !

Babel Plans

Par Laetitia Santos

Posté le 17 novembre 2016

Un voyage au centre de la terre, voilà ce que nous offre la spectaculaire visite du Gouffre de Padirac, dans le département du Lot, qui mêle lacs souterrains, exploration en barque, salle cathédrale à couper le souffle, savants jeux d’ombre et de lumière, concrétions multiformes, légendes mystiques et données scientifiques, le tout dans une enveloppe silencieuse ou dans un bruissement d’eau assourdissant. Une épopée souterraine à couper le souffle.


« Ici commence la vraie merveille… » Tels auraient été les mots d’Édouard-Alfred Martel, le père de la spéléologie moderne qui, à bord du Crocodile, découvrit en 1889 la rivière du Padirac et le gouffre alors inviolé qu’elle creusa des millénaires durant. On imagine son émotion et sa difficulté de progression, là à 103 mètres sous terre, plongé dans un noir intégral… Mais quel frisson !

Au fond du gouffre...

La rivière, elle s’étire précisément sur 20 km tandis que les galeries elles, ondulent sur plus du double. De la bouche béante du Padirac par laquelle on s’enfonce jusque dans les entrailles de la terre, à cette découverte caverneuse stupéfiante, la visite est un voyage digne du meilleur Jules Verne qui nous plonge dans un décor propice au rêve et à l’imaginaire…

Là-dessous, l’eau et l’air sont étroitement liés, 12° dans l’eau, 13° dans l’air, l’un n’allant pas sans l’autre. Pas étonnant qu’à force d’une telle complicité, la force mécanique de l’eau ait creusé, rongé si profondément ces failles malléables qui se déploient devant nous sans que l’on en voit le bout. Leur entente donne même lieu à des œuvres d’art étonnantes : concrétions en piles d’assiettes, champignons par ci, brocolis par là, draperies ou dentelles de calcite…

Le calcaire jurassique, la rare végétation ou encore l’écoulement de l’eau donnent à la roche des couleurs d’une infinie subtilité, passant de l’ocre à la couleur sable, du brun à l’olive ou au violine.

L’eau verte sublimée par la chaleur des spots révèle une maigre faune qui se limite à quelques poignées de crevettes niphargus ou à une variété de bigorneaux adepte des tréfonds. Au-dessus de nos têtes, la présence de quelques 2000 chiroptères siestant têtes en bas accrochés à la paroi…

Tantôt le plafond semble nous tomber sur la tête, tantôt on n’en voit même plus la voûte, tantôt les parois sont humides et les gouttes acides nous perlent dessus, tantôt on peut s’adosser aux parois pour contempler - au sec - l’immensité de cette folie rocheuse qui nous enveloppe à ce moment là.

Le Lac de la Pluie, la Grande Pendeloque, le Rétrécissement, le Pas du Crocodile, le Passage des Étroits, le Lac des Grands Gours, tels sont les noms quasi magiques des différents spots que l’on croise au fil de notre progression, ce stalactite géant de 75 mètres de haut comme point d’orgue d’une découverte qui nous scotche. Notre plus grande émotion ? La salle du Grand Dôme, dont la voûte se déploie à 90 mètres au-dessus de nos têtes ! Sensation incroyable et quasi-mystique de se retrouver infiniment petit au cœur de cette cathédrale de pierre que Dame Nature a bâti infiniment grande…

... sans vendre son âme au Diable !

Est-ce l’antre du Diable comme le voudrait la légende de la création du gouffre ? Elle raconte qu’alors que Saint Martin cheminait sur sa mule entre Autoire et Montvalent, Satan lui apparut et lui proposa une épreuve pour sauver les âmes de damnés qu’il souhaitait conduire à l’Enfer. Le diable frappa le sol de son talon et fit apparaître une cavité immense que Saint Martin sur sa monture dû franchir.

Dans un bond extraordinaire, il réussit l’épreuve et Satan, furieux disparu dans le ventre de la terre par le trou béant de 35 m de diamètre qui devint dans l’imaginaire de la région un portail aux enfers, d’où son nom de Padirac ou « Pas du diable » en occitan … Diable ou pas, on en redemande à tel point que l’on ne cesse de questionner Mathieu, notre sympathique guide à la fois géologue et batelier des entrailles, qui se partage la visite du gouffre avec près de quarante collègues à la journée en haute saison ! On n’aurait presque pas envie de remonter à la surface mais bien de profiter encore de cette beauté souterraine…

On en repart émerveillé, l’esprit embué de magie et la conscience écologique aiguisée : saviez-vous que le découvreur du Gouffre de Padirac a donné son nom à la loi Martel ? Lui avait sensibilisé l’opinion publique à la pollution des rivières et la loi Martel interdit notamment de jeter des cadavres d’animaux dans les eaux sous peine de les rendre impropres. De quoi prendre un peu plus soin de notre environnement à la sortie en ayant pleinement décidé de ne pas pactiser avec le diable en matière de déchets et de préservation des eaux... !

A lire aussi :

TOP 10 - Le Lot en hiver : seuls au monde dans un cocon de douceur