Safar - L'Iran sans train-train

Culture

Par Laetitia Santos

Posté le 18 octobre 2014

Un voyage ferroviaire au rythme lent, dans un compartiment occupé par trois jeunes filles d’aujourd’hui, le temps d’une traversée Nord-Sud de l’Iran. Troublant.


Non, l’Iran ne s’est pas arrêté à Jamais sans ma fille. Le pays n’est pas pétri uniquement de terreur et de radicalité, la nuance existe, même en Iran. Preuve en est cette édifiante pellicule signée Talheh Daryanavard, qui nous fait partager le voyage en train de trois demoiselles iraniennes dans la vingtaine, originaires de la campagne mais montées à Téhéran pour suivre des études supérieures, instruites et bien décidées à se bagarrer pour leur liberté de penser.

Si tout se passe dans un compartiment de train, le sujet n’en est pas pour autant contraint. À l’image de cette fenêtre qui permet à Fatoma, Asma et Amina de laisser leurs regards se porter loin, pleins d’espoir, la parole se délie et fait fi des tabous. Le huis-clos devient prétexte à la confidence, à l’intimité. Et les réflexions culturelles et sociales s’affirment : celle d’un bonheur féminin propre et non plus seulement au service d’un mari, la révolution d’un microcosme archi-traditionnel, une émancipation par l’éducation

Les sujets évoqués paraissent banals une fois ramenés au spectre de notre pays ? Ils prennent tout leur sens quand, sous l’oeil de ce réalisateur plus Occidental qu’Iranien puisque parti d’Iran à l’âge de 9 ans, ils témoignent d’une société en pleine mouvance, d’une jeunesse ambitieuse, libertaire, engagée.

Safar va plus loin et nous fait même oublier que nous sommes bercés sur les rails d’un wagon iranien pour nous renvoyer à nos propres vies de femmes, nos propres inquiétudes, joies et combats. Et si l’Iran finalement était pétrie de préoccupations universelles et que là-bas se dégageait une vie que l’on aurait pas soupçonnée d’ici, noyés sous les a priori ?...

À noter : pour une autre expérience de l’Iran sur le Festival du Grand Bivouac 2014, optez pour Routes persanes, le film de Mélusine Mallender partie seule avec sa moto en Orient et notamment en Iran. Une tranche de culot et de courage au féminin doublée d’un regard actuel et vivifiant sur l’Iran.