"L'Absence" : Dakar noir‏

Culture

Par Laure Croiset

Posté le 22 janvier 2014

Avec "L’Absence", Mama Keïta pose sa caméra dans les rues de Dakar pour traquer l’enfer de la corruption et de la prostitution. Entre drame social et polar sec, ce long-métrage force le respect.


Adama est un jeune polytechnicien qui a effectué de brillantes études en France. Absent de son pays depuis une quinzaine d’années, il revient précipitemment dans la maison de son enfance au Sénégal. Alarmé par un télégramme qui lui apprend la soudaine dégradation de l’état de santé de sa grand-mère, qui l’a élevé à la mort de leurs parents, Adama découvre que sa grand-mère se porte comme un charme… A-t-il été sciemment induit en erreur ? Pourquoi ?

Il a fière allure Adama. Le costume impeccable, la démarche assurée, il porte pourtant sur son visage une cicatrice qui vient exprimer la douleur d’un coeur meurtri depuis la mort de sa mère. Ce retour de 48 heures sera l’occasion pour Adama de regarder Dakar en face cette ville qui s’est transformée en mirage. Ici, on volait des cacahuètes. Maintenant, on y trouve des vampires de la pire espèce. La mafia gangrène la ville et sa soeur qui s’est emmurée dans le silence se livre à la prostitution. Lorsqu’Adama découvre la sombre vérité, une chasse à l’homme s’organise dans les rues opaques de la ville. La tragédie s’installe, la violence aussi, et le drame social laisse place à un polar sec et ombrageux.

Rares sont les images qui nous viennent du Sénégal. Avec son regard puissant et sans détours, Mama Keïta dresse le portrait d’un pays qui agonise en silence. Ici, la douleur d’une population dévorée par la mafia. Là-bas, ces enfants qu’on a laissé partir. D’un côté comme de l’autre, la souffrance, le silence, et cette longue absence. Avec ce long-métrage, c’est la parole qui est libérée de part et d’autre. Et au final, cette image figée d’un homme en larmes aux pieds de sa soeur nous laisse espérer à un avenir meilleur.