Depuis 2004, il est le coordinateur local de l’association belgo-marocaine Rencontres d’Aït Aïssa. Berbère originaire de la vallée du même nom, il guide les voyageurs désireux d’expérimenter les traditions de ce peuple ancestral à travers le Haut et le Moyen-Atlas. Lui, c’est Abdellah Ameziane, 51 ans, passeur de culture indispensable pour tout partage authentique dans ces régions isolées.
Découvrir le partenaireIl vocifère au téléphone, perd toute contenance en ville, se déplace rarement sans son fidèle bras-droit Ismaïl et n'est pas vraiment un fervent croyant... ! Voilà ce qui fait tout le charme de notre cher Abdellah ! Lui qui possède une ferme au coeur du Haut-Atlas, des hectares d'oliviers et un troupeau entier de brebis, 4 enfants, et une femme originaire du Moyen-Atlas qu'il a rencontré alors qu'il était à la recherche d'un climat plus propoice pour de l'eau et des paturages pour ses bêtes. Un homme typique de la région en somme, ouvert, chaleureux, aimant valoriser sa culture et ses traditions.
« Je fais un peu d'élevage de brebis, le métier de mon père et de mon grand-père avant lui. Je suis issu d'une famille nomade, nous l'étions jusqu'en 1984, avant que l'on aille s'installer à Beni Tajit, là où nous avons été à l'école mes 11 frères et soeurs et moi. Avec le changement climatique et la sécheresse qui frappe d'une année à l'autre, le mode de vie nomade tend à disparaitre. Les mauvaises années, il faut chercher une activité complémentaire pour pouvoir vivre tout en gardant le troupeau. C'est comme ça que j'ai pensé devenir guide et que je suis devenu coordinateur pour Rencontres d'Aït Aïssa. Et depuis, j'investis l'argent de ce métier dans l'élevage. »
Après avoir randonné quelques jours à ses côtés entre Haut et Moyen-Atlas, on a eu envie de lui tirer le portrait et de lui adresser quelques questions toutes simples pour mieux dessiner les contours de ce personnage clef dans la région.
Abdellah, peux-tu nous partager le sens de l'écotourisme selon toi ?
« L'écotourisme, c'est voyager dans le respect de la nature, des traditions et de la culture locale. Grâce aux voyages organisés par l'association Rencontres d'Aït Aïssa*, on essaye de faire profiter les familles qui vivent dans des conditions très difficiles tout en permettant aux visiteurs de vivre une expérience très concrète. Lorsque tu pousses la porte des maisons, que tu vis avec les familles, c'est là que tu partages avec les vrais Marocains. Et l'argent de ce tourisme aide les gens d'ici, on joint donc l'utile à l'agréable.* »
Ces populations berbères, qu'ont-elles à transmettre aux voyageurs ?
« Des valeurs d'accueil et d'hospitalité très fortes, de solidarité aussi lorsque l'on constate la façon de vivre dans ces villages. Du respect, de la bonté… Ca nous vient de nos ancêtres et non pas de la religion. Vous saviez que la plupart des Berbères n'étaient pas croyants ? Le vivre ensemble, l'acceptation de l'autre dans sa différence, voilà ce que transmet un tel voyage… Et puis les gens ont peu de richesses matérielles ici, ils possèdent avant tout une richesse de l'âme. Pour le monde moderne, je crois que c'est une leçon essentielle... »
Et en retour, qu'en retirent les familles ?
« C'est un choc culturel qui se fait forcément dans les deux sens. Les familles d'accueil ont une vraie volonté de rencontrer l'Autre. C'est un moment d'ouverture pour elles, ça leur permet de voir du monde alors qu'elles vivent très isolées. Alors quand elles reçoivent des voyageurs, c'est un grand jour chez elles ! »
"Mieux vaut allumer une bougie qu'insulter l'obscurité", dit un proverbe berbère. En quelques jours à peine, il en a allumé plein des bougies dans notre âme Abdellah, farandole de lumières humaines distillées par le mode de vie berbère qui donnent tant foi en la grandeur de l'Homme...