"Boomerang" nous met la puce à l'oreille

Culture

Par Laure Croiset

Posté le 22 mars 2012

Après "Les Nouveaux Explorateurs", Canal+ s'essaye au documentaire engagé avec le lancement de "Boomerang". Le premier épisode "La Puce à l'oreille", dévoilé hier, partait sur les traces de l'un des objets les plus vendus au monde : le téléphone portable. Déroutant.


D’un simple téléphone portable qu’on achète et qu’on jette sans se poser de questions, notre co-réalisateur Diego Bunuel, entouré de reporters partis aux quatre coins du monde, décrypte un monde globalisé dans lequel nos habitudes de consommateurs sont mises à mal.

Levant le voile sur les conséquences insoupçonnées de notre fâcheuse habitude de changer de portable tous les 18 mois, il démontre que derrière chaque geste, chaque composante de cet objet du quotidien, se dissimulent bien souvent des conditions de travail épouvantables, où dignité et conditions de l’homme ne sont en aucun cas respectées.

Ce voyage haletant nous conduit sur les grises mines du Congo où la cassitérite, matériau qui se transforme en étain, nécessaire pour souder la carte mémoire de notre téléphone, est extraite au péril de la vie de mineurs. Là-bas, une guerre sans merci fait rage pour le contrôle des minerais. Et c’est Bertrand Coq, grand reporter, qui s’en est allé à la rencontre d’une population exploitée, finançant malgré eux les différents groupes armés qui peuplent la région. Le face à face entre le journaliste et le chef des Maï-Maï, entouré de ses jeunes troupes, est édifiant.

C’est ensuite à Shenzen, en Chine, que l’équipe de Boomerang s’est déplacée, à la rencontre d’une génération sacrifiée qui assemble frénétiquement 20 téléphones par seconde. Une population entière qui déserte leur province et leurs enfants pour satisfaire la boulimie des consommateurs occidentaux. Si la révolte commence à gronder chez les jeunes, les filets anti-suicides qui sont installés autour de l’une des plus grandes usines de la ville, ne laissent planer aucun doute sur les conditions de travail en cours ici.

Boomerang met ensuite le doigt sur l’immense gaspillage électronique et ses conséquences en s’enfonçant dans les alentours de Delhi en Inde. Ici, les habitants ont fait du recyclage de nos gadgets électroniques un mode de vie. On transforme l’or présent sur les puces de nos téléphones en bijoux, en passant par des phases de transformation aux conditions sanitaires plus que précaires.

Mais ce documentaire ne se contente pas d’alarmer le consommateur sur ce mode de fabrication, il nous amène également à la rencontre de personnes qui se battent pour changer nos habitudes. D’Amsterdam, à Berlin, en passant par Paris, des solutions concrètes sont proposées pour modifier cette chaîne de production dévastatrice. On retiendra le travail d’une ONG néerlandaise qui travaille sur le développement d’un téléphone équitable, le "Fair Phone" et l’action menée en France par les Ateliers du Bocage, lancés par l’association Emmaüs, qui grâce au recyclage des téléphones portables, arrive à créer des emplois, nous prouvant une fois de plus que l’écologie est l’industrie du futur.