Brésil : le chef Raoni accuse Bolsonaro de crimes contre l'humanité

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Par Sophie Squillace

Posté le 26 janvier 2021

Photo Sources: Carl de Souza / AFP.

Le chef de tribu Raoni, défenseur emblématique de la forêt amazonienne porte plainte contre le président brésilien devant la Cour pénale internationale. Il l’accuse de « persécuter » les peuples autochtones en violant leurs droits fondamentaux et en détruisant leur habitat.


Voilà un espoir qui permettrait peut-être d’accélérer les choses, dans le bon sens ! La plainte déposée le 22 janvier auprès de la Cour pénale internationale (CPI) de La Haye rappelle haut et fort que la destruction de la forêt amazonienne connaît une accélération sans précédent, et demande aux juges internationaux d’enquêter pour « crimes contre l'humanité » à l’encontre du président brésilien Jair Bolsanaro et de son gouvernement.

Une politique de destruction de la forêt amazonienne

Depuis son investiture en janvier 2019, Jair Bolsonaro multiplie les actes graves et les déclarations menaçantes, affichant clairement son ambition de « lever tous les obstacles pour piller les richesses de l’Amazonie » selon les plaignants. Ils rappellent qu’au-delà de la déforestation, la politique nationale brésilienne mène à des meurtres, des déplacements de population, ainsi que des persécutions, formant ce que définissent les « crimes contre l'humanité » selon le Statut de Rome de la CPI.

Les faits qui accablent la politique menée par le gouvernement de Bolsonaro, résumés dans la plainte du chef Raoni, sont sans équivoque : « augmentation de la déforestation de 34,5% en un an, taux d’assassinat de leaders autochtones le plus élevé depuis ces onze dernières années, effondrement et menaces des agences environnementales... » Selon l'Institut national de recherche spatiale (INPE), la forêt tropicale a perdu plus de 11 000 km² en 2020. Grâce à l’analyse des images satellites, l’étude montre que la déforestation au Brésil a atteint un niveau inégalé depuis 12 ans !

Beaucoup de mesures inquiétantes laissent la porte grande ouverte à tous ceux qui grignotent et détruisent la forêt amazonienne. Alors que les peuples autochtones sont les véritables « gardiens de la forêt », le projet de démarcation des terres indigènes en cours a été suspendu, bafouant directement les droits des peuples autochtones garantis par la Constitution depuis 1988. Ce système brésilien de droits de propriété collective n’est plus à l’ordre du jours depuis l’élection de Bolsonaro, laissant près de 2 millions d’hectares de terres autochtones en proie à l’exploitation minière et agricole. Dans le même temps, les agences environnementales sont reprises en main par le ministère de l’Agriculture, et enfin, comme l’expose la plainte, sept meurtres de chefs autochtones en 2019 sont restés impunis.

Sauver l’Amazonie et le mode de vie des tribus autochtones au Brésil

La « communication » d’une soixantaine de pages, rédigée par l’avocat français William Bourdon, rassemble toutes les accusations issues de différents acteurs, ONG locales et internationales, institutions, scientifiques, experts climat... La plainte souhaite interpeller la CPI en rappelant que le problème ne concerne pas que le Brésil, la forêt amazonienne est le poumon vert de la planète, indispensable à la régulation du climat. Déjà menacée par des incendies record en 2020, sa destruction « constituerait un danger direct pour toute l’humanité » souligne la plainte.

Photo Sources: Greenpeace

En détruisant l’un des écosystèmes de notre planète, le président brésilien, et plusieurs de ses ministres incriminés, se rendent directement coupables d’écocide. Mais le crime d’écocide n’existe pas encore en droit international.

Créée en 2002 pour garantir justice aux victimes des pires atrocités commises dans le monde, la CPI n'est pas contrainte de donner suite aux requêtes déposées auprès de sa procureure, Fatou Bensouda. Elle seule décide indépendamment des affaires qu’elle soumet ou non aux juges, qui pourront alors délivrer un mandat d’arrêt ou une citation à comparaître. L’espoir est permis, la CPI peut dès à présent décider d’agir, pour montrer l’exemple et faire avancer le droit international et le combat historique du chef Raoni.