Par Laure Croiset
Posté le 21 juin 2012
"Couleur de peau : Miel" est un film hybride, qui mêle subtilement animation et prises de vues réelles. Adaptation cinématographique du roman graphique et autobiographique de Jung, il dévoile les tourments identitaires d’un être arraché à sa terre natale, la Corée, qui va devoir s’adapter à sa nouvelle vie en Belgique.
Ils sont 200 000 enfants coréens disséminés à travers le monde depuis la fin de la guerre de Corée. Jun Jung Sik est l’un d’eux. Né en 1965 en Corée, il quitte son pays natal en 1971. Quarante ans plus tard, il nous conte le récit de ses années passées à l’orphelinat, son arrivée en Belgique, la vie de famille qu’il va devoir appréhender, son adolescence tourmentée... Tous ces événements l’ont conduit à accepter ses différentes identités, l’abandon par sa mère, l’accès à l’imaginaire par le biais de ses dessins. Autant de thèmes réunis autour d’une destinée à la fois hors du commun et pourtant si universelle.
"Je suis d’ici, mais aussi d’ailleurs, la couleur de ma peau est Miel". Cette phrase prononcée par notre narrateur, Jung, qui, quarante ans plus tard, répond à la promesse qu’il s’était faite enfant en signant son retour en Corée, avec cette étrange sensation d’être un touriste où qu’il se trouve, reflète le processus lent et complexe d’une acceptation. Acceptation de ses origines, mais également acceptation de sa propre histoire ponctuée par des interrogations multiples, auxquelles il décide de répondre par l’imaginaire, s’adressant à cette mère si proche et pourtant si lointaine qui a décidé, un jour, d’abandonner son fils.
Ce lien avec ses origines, Jung ne va pas le trouver auprès des enfants adoptés arrivés en même temps que lui dans ce petit village de Belgique, il va chercher des saveurs perdues, ces essences épicées en se gavant de riz blanc au tabasco. Le processus est violent et va conduire Jung à se rapprocher un peu plus de sa mère adoptive. Mais c’est également à travers le Japon, terre voisine mais néanmoins ennemie de ses ancêtres, qu’il va découvrir une familiarité de traits et un tempérament guerrier qui fera ressortir sa violence d’adolescent. Puis, peu à peu, c’est la paix que Jung parvient à trouver, gravant cette quête identitaire sur du papier avec tout d’abord ce roman graphique paru en 2007, auquel viendra s’ajouter d’ici peu un troisième tome, et maintenant avec ce film hybride et sensible, qui apparaît comme la plus belle forme d’hommage à la mère.