Dunkerque, destination colorée et dans le vent

Babel Plans

Par Élise Chevillard

Posté le 24 octobre 2024

Située au creux des vagues du Nord, Dunkerque offre un nouveau visage depuis quelques années, loin de la cité grise et industrielle que l’on se dépeint. Les villas malouines et les marchands de glaces bordent le front de mer de Malo-les-Bains, quand les cabanes colorent la vaste plage dès le début de l’été. Du longe-côte à la pêche à la crevette, en passant par une visite du FRAC ou une échappée à vélo le long de la Vélomaritime, démonstration en 48 h que Dunkerque est une destination dans le vent, placée sous le signe de l’eau !


Dunkerque, dont le nom signifie « l’église dans les dunes », est une ville dont l’histoire est intimement liée à la mer et au vent. Fondée au VIIe siècle, la cité de Jean Bart a été le théâtre de nombreux événements historiques, des incursions vikings aux guerres mondiales. Le vent a toujours été un compagnon fidèle des Dunkerquois, gonflant les voiles des navires des corsaires et portant les échos de leurs batailles. Aujourd’hui, il souffle, joueur, sur les chars à voile et les kitesurfs qui prennent d’assaut les plages, par jour de grand vent.

JOUR 1 - 10h. On prend de la hauteur pour embrasser la cité de Jean Bart

P1190740 Crédit photo : EliseChevillard

Dès votre arrivée à Dunkerque, prenez place à bord de l’un des bus. Ils sont gratuits et relient les principaux centres d’intérêt de la ville. Cette dernière se parcourt aisément à pied. De la gare à la mer, comptez environ 40 minutes de marche. Parfait pour chauffer les muscles, avant de s’attaquer à la montée du beffroi de Saint-Éloi, inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO. Après avoir emprunté l’ascenseur et gravi une vingtaine de marches (attention, ça grimpe rude !), Dunkerque se dévoile dans toute sa splendeur : ses toits de tuiles rouges, son port animé, et plus loin, l’étendue infinie de la mer du Nord. Pour info, tout l’été et même un peu après, des apéros au sommet sont organisés chaque vendredi soir ! Avant de redescendre, surveillez votre montre pour vous arrêter au moment où le carillon sonne le quart d’heure. Vous pourrez alors profiter du spectacle offert par 50 cloches jouant une jolie mélodie.

12h. On déjeune aux couleurs de l’Italie chez o’Gabi

IMG 6795 Crédit photo : EliseChevillard

« Bienvenue chez o’Gabi », lance chaleureusement Marion, la propriétaire de ce petit restaurant situé non loin de la place Jean-Bart. Avec son mari, Mike, qui s’active en cuisine, ils ont ouvert ce lieu en 2022, et proposent une cuisine aux inspirations italiennes, entièrement faite maison, avec des produits frais, bio et locaux, pour les omnivores, les végétariens et les vegans ! Sur les murs, des papillons prennent leur envol. La déco, tout comme les assiettes, est colorée. Au menu ce midi, difficile de choisir : ravioles toutes fraîches farcies à la ricotta et au parmesan, risotto à la tomate bio, panzerottti caprese... Alors le couple a pensé aux indécis et propose un menu trio qui regroupe les trois entrées du jour. À partir de 14h, le restaurant passe en mode salon de thé, l’occasion de rester encore un peu, en attendant que la pluie cesse dehors.

14h. On plonge dans l’art contemporain au FRAC

Saviez-vous que la plus belle photo à faire à Dunkerque, c'est celle du FRAC au soleil couchant ? Sur les rives de la mer du Nord, là où les vagues rencontrent les dunes, se dresse un joyau d’architecture contemporaine qui scintille sous le ciel changeant de Dunkerque : le Fonds Régional d'Art Contemporain (FRAC). Pour y arriver, plusieurs possibilités : on prend le bus depuis le centre ou en emprunte la passerelle depuis la digue. Conçue par les architectes Lacaton & Vassal, cette « cathédrale industrielle », vestige de l'ancien chantier naval est habillée de verre et de métal. Son jumeau juste à côté est sa copie exacte. Ici, un vent de nouveauté souffle constamment sur ses 6 niveaux.

Photo IMG 6885 Crédit photo : EliseChevillard

À l’intérieur du FRAC, une vaste collection d’art contemporain vous attend avec comme spécialité, le design. Les œuvres, soigneusement sélectionnées, offrent un panorama éclectique de la création artistique moderne, des installations audacieuses aux peintures abstraites. Le FRAC n’oublie pas de se renouveler avec des expositions temporaires qui attirent des artistes de renommée internationale. Ici, l’art devient accessible à tous, car c’est aussi un lieu de rencontre et d’échange, animé par des événements culturels, des conférences et des ateliers créatifs pour les enfants.

16h. On découvre les villas balnéaires de Malo-les-Bains

Une fois sorti du musée, empruntez la passerelle, elle vous mènera directement sur la « Digue ». Alors qu’à l’ouest, les cheminées industrielles fument, à l’est, la plage s'étend jusqu'à la Belgique, en passant par Malo-les-Bains. Souvent surnommé la "Reine des Plages du Nord", c’est un quartier de Dunkerque renommé pour ses élégantes villas malouines. C'est à la Belle Époque, à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, que Malo-les-Bains connaît son âge d'or. La bourgeoisie lilloise commence à affluer vers cette nouvelle station balnéaire, séduite par les attraits de la côte et cherchant à profiter des bienfaits de l'air marin et des bains de mer. De nombreuses villas malouines sont alors construites pour les accueillir. Leurs façades, ornées de détails raffinés, racontent les récits des familles qui y ont vécu. Mélangeant les styles Art nouveau, néogothique, et régionaliste, ces maisons se distinguent par leurs tourelles, leurs balcons ouvragés, leurs bow-windows mais aussi l'utilisation de la brique et la pierre. L'Office de tourisme propose des visites sur ce thème en autonomie ou guidée. Parmi la centaine de villas que l’on trouve à Malo, citons la villa Ringo qui n’est pas sans nous rappeler l’architecture de Gaudi. Pour la petite histoire, ce sont les motifs des villas qui ont d’ailleurs inspiré la décoration des cabines de plage de Malo-les-Bains.

18h. On prend la mer pour un « Apéro Sunset »

IMG 7082 Crédit photo : EliseChevillard

Et si on mettait les voiles ? Quand le crépuscule approche, c’est sur les flots que l’aventure continue. Embarquez avec le club croisière Alidad pour un « Apéro Sunset » à bord d’un voilier. Ne vous attendez pas à vous caler dans un coin du bateau et à ne rien faire. « Ici, tout le monde participe aux manœuvres ! », rappelle Christophe, votre guide-skipper, plusieurs fois champion de France. Les voiles blanches gonflées par une brise légère, le bateau avance sur cette mer tantôt calme, tantôt joueuse. On enfile alors les vagues à en devenir marin. « Loffé, avalé, bordé, choqué, affalé, étarqué, » tous ces mots n’auront plus de secret pour vous à la fin de la journée. Le clou du spectacle, la petite sirène posée au milieu de la mer et qui dévoile ses courbes sans pudeur. Une fois revenu au port, place à l’apéro avec des produits on ne peut plus locaux. Toute la charcuterie fumée vient d’un artisan situé place Turenne. Avec un verre à la main, entouré d’amis ou de nouveaux compagnons de voyage, on se sent alors en harmonie avec le monde.

22h. On s’endort au Merveilleux après avoir dégusté un plateau de fruits de mer

À Dunkerque, les produits de la mer, fraîchement pêchés, sont à l’honneur dans de nombreux restaurants. Au restaurant l’Iode, par exemple, on déguste des huitres, des crevettes grises, des moules et des poissons du jour... face à la mer. Autre spécialité, mais cette fois-ci sucrée, la couque suisse que l’on peut déguster à Ruello. C'est une brioche garnie avec des pépites, inventée en 1960. À moins que vous ne craquiez pour un merveilleux, une recette dunkerquoise, qui a donné son nom à un charmant hôtel, les pieds dans l’eau. Situé face à la mer et des célèbres cabines de plage de Malo, l’hôtel Merveilleux porte bien son nom. Un conseil, la nuit, laissez votre fenêtre ouverte pour vous endormir bercé par les vagues, tout en respirant les embruns. Un petit salon de thé est ouvert à tous.

JOUR 2 - 10h. On enfile sa combi pour une séance de longe-côte vivifiante

DCF 9588 crédit Laurine Thiodet

Chaque matin, lorsque le soleil hésite encore à se lever, des silhouettes apparaissent sur la plage de Malo-les-Bains, dans une étrange farandole. Équipés de combinaisons et de chaussures adaptées, les longeurs s’avancent avec détermination dans la mer du Nord. Saviez-vous que le longe-côte était né à Dunkerque ? Il est alors temps de rencontrer Thomas Wallyn, le visionnaire à l’origine du longe-côte. Ce dernier propose des initiations seul ou en groupe. Sous ses instructions bienveillantes, il vous faudra faire plusieurs bords au Nord, au Sud, pour arriver à coordonner vos bras et vos jambes. Car, détrompez-vous, le longe-côte ce n’est pas seulement « marcher dans l’eau ». Immergé jusqu’à la taille, on va utiliser la résistance de la mer pour avancer dans l’eau. Les bienfaits de cette randonnée aquatique sont multiples. « C’est aussi une méthode de musculation en mer. On travaille l'équilibre, la force et l'endurance. Et au-delà de l’exercice, c’est une véritable thérapie pour l’esprit » raconte le fondateur. Et comme ce sport n’en finit pas de se réinventer, Thomas Wallyn a imaginé des palmes de bras, pour ajouter un peu de défi et travailler encore plus les muscles du haut du corps. Ici, chaque mouvement devient une communion intime avec l’eau, une étreinte salée avec la mer... ou on prend son filet pour partir à la pêche à la crevette.

IMG 7903 Crédit photo : EliseChevillard

Dès que la marée est basse, les plages de Dunkerque deviennent le théâtre d’un rituel ancien : la pêche à la crevette. Équipés de filets et de grandes cuissardes, les apprentis pécheurs s’aventurent l’eau à mi-cuisse. Ils s’avancent, poussant leur filet, parallèle à la côte, et guidés par les conseils avisés des pêcheurs locaux : Jean, Henri et Patrick. Seul le doux clapotis des vagues et les cris lointains des mouettes, viendront rompre le silence de cette matinée. Chaque coup de filet remue le sable, révélant les crevettes grises qui se cachent en dessous. Les crevettes grises, une fois pêchées, sont déposées dans la grande hôte que portent sur leur dos les pécheurs. Elles seront ensuite triées... par la trieuse. Car la pêche est réglementée. Toute crevette mesurant moins de 4 centimètres sera rendue à la mer. La récompense ? La dégustation sur place ou à la maison avec un peu d’ail et de persil ! Pensez à acheter un filet pour les enfants, dans l’une des boutiques de bord de mer.

12h. On se fait une baraque à frites pour reprendre des forces

L’air marin ça creuse ! Alors quoi de mieux que d’assouvir sa faim dans une institution locale : la friterie, et de demander : « Eul paquet de frites » à emporter. Attention, ici, on ne plaisante pas avec la préparation des frites. C’est tout un art ! Les pommes de terre, soigneusement sélectionnées, sont épluchées et coupées à la main avant d’être plongées dans une huile bouillante. La double cuisson est une étape essentielle et confère à la frite un croustillant à l’extérieur et un moelleux à l’intérieur. Elles sont servies dans une barquette, agrémentées de sel et de vinaigre (si vous n’avez jamais essayé, c’est le moment !) Mais les friteries ne se contentent pas de servir des frites. Elles proposent aussi une variété d’accompagnements : fricadelles, beignets de poisson, croquettes de crevettes et les mitraillettes (sandwiches garnis de viande et de frites).

14h. On poursuit notre escapade iodée sur la Vélomaritime

DCF 9920 : crédit Laurine Thiodet

Saviez-vous que le territoire dunkerquois est traversé par la Vélomaritime ? Pour les amoureux de la nature, une balade à vélo s’impose sur la voie verte qui longe en partie la côte. Il s’agit d’un circuit balisé et dédié au vélo de 1500 km, reliant la Bretagne à la frontière belge en passant par Dunkerque et Zuydcoote. N’hésitez pas à louer un vélo chez LVDK , pour emprunter un petit bout de cet itinéraire. Les dunes et les plages infinies succèdent aux prairies sauvages et aux espaces boisés. Le vent marin dans les cheveux, la mer à l’horizon, chaque coup de pédale est une ode à la liberté.

16h. On prend une pause gourmande au Kotje, entre deux coups de pédale.

Installé en face de la place de la gare à Zuydcoote, le Kotje est un nouveau lieu qui se veut hybride. Ce mot flamand qui signifie "petit abri" est né de ces "kotjes" communaux, où l’on vendait des produits de première nécessité, essentiellement locaux et parfois transformés en divers ateliers. À la fois salon de thé, librairie, épicerie et restaurant, on y trouve aussi des créateurs et des artistes locaux, des jeux de société, des bons gâteaux et des salades gourmandes pour les grandes faims.

18h. Envie de poursuivre le séjour ?

Lors de votre séjour à Dunkerque, ne manquez pas son musée portuaire installé dans un ancien entrepôt de tabac. Il propose des expositions fascinantes sur la vie portuaire, les métiers de la mer et les grands événements maritimes de Dunkerque. Montez aussi à bord du trois-mâts Duchesse Anne et du bateau-feu Sandettie pour une expérience immersive. Dunkerque est aussi célèbre pour l'Opération Dynamo, l'évacuation des troupes alliées en 1940. Le Mémorial du Souvenir retrace cet événement crucial de la Seconde Guerre mondiale à travers des films, des photos et des objets d’époque. Poussez (en bus gratuit depuis Dunkerque) votre escapade à Gravelines, l'unique ville française fortifiée entourée d'eau. Son phare, avec ses spirales noires et blanches, ne passe pas inaperçu. Ça tombe bien, il abrite une exposition au rez-de-chaussée qui permet de retracer le quotidien de ces derniers occupants. Mis en service en 1848, il va illuminer le chenal jusqu’en 1979. Son dernier gardien y résidera jusqu'en 2002. 116 marches plus tard, profitez de la jolie vue sur Petit-Fort-Philippe. Une belle façon de terminer cette escapade dunkerquoise, en l'achevant de la même manière qu'elle avait débuté, en hauteur.