La Mauritian Wildlife Foundation : la biodiversité mauricienne comme mission

Babel Plans

Par Eric Maquenhen

Posté le 24 février 2021

Photo Sources: Mauritian Wildlife Foundation.

La Mauritian Wildlife Foundation (MWF) a pour mission de sauver les espèces menacées de l'Ile Maurice grâce à la restauration d'écosystèmes entiers. Recherche, gestion de données, études, transmission à la population locale et aux visiteurs font partie de ses domaines d'action. Et les résultats sont là : le travail réalisé constitue l'un des exemples les plus réussis en matière de conservation dans le monde. Partez avec Eric de l'agence Moris Otreman, notre partenaire local, à la découverte de cette initiative engagée.


Le rendez-vous est pris à l'embarcadère de Pointe-Jérôme avec Arabelle et Letichia, guides passionnantes et passionnées que je remercie vivement et dont je salue les compétences pour une courte traversée à destination de l'Ile aux Aigrettes. Au loin, les restes du tristement célèbre Wakashio, vraquier de son ex-état venu se briser sur les récifs, souiller près de 30 kilomètres de côtes mauriciennes et assombrir encore plus en cette année de pandémie la vie déjà difficile de nombreux pêcheurs et habitants qui vivent souvent exclusivement de la mer dans cette partie de l'île. Après 4 mois de fermeture suite à la catastrophe écologique, l'Ile aux Aigrettes a rouvert ses portes début décembre entre soulagement et inquiétude.

L’île aux Aigrettes, incroyable réserve naturelle

L'île aux Aigrettes est une petite île de 27 hectares située dans la baie de Mahébourg, à environ 850 mètres au large de la côte sud-est. Contrairement à Maurice, d'origine volcanique, l'île est constituée de calcaire corallien et on y retrouve d'ailleurs les ruines d'un ancien four à chaux. Elle abrite les derniers vestiges de la forêt côtière sèche entourant autrefois presque la totalité de l'Ile Maurice.

Photo Sources: Mauritian Wildlife Foundation

Comme elle, l'île aux Aigrettes a été touchée par l'abattage des arbres et le défrichage des terres. Rappelons-nous qu'il ne reste à Maurice que 2% de forêt endémique, détruite au profit de la culture de la canne à sucre importée par les Hollandais. De plus, l'introduction d'espèces animales et végétales exotiques a presque détruit intégralement la faune et la flore.

En 1965, l'île est déclarée réserve naturelle et les efforts considérables pour la restauration de sa forêt ont permis de réintroduire des espèces rares qui avaient disparu depuis longtemps. Une restauration complète a été réalisée, avec l'élimination des plantes et des animaux introduits, la plantation d'espèces indigènes côtières et la réintroduction d'espèces endémiques d'oiseaux et de reptiles : gecko diurne orné, cateau verte, cardinal de Maurice, pigeon rose des mares, scinque de Telfair... Il aura fallu onze ans pour cela !

Une biodiversité d'importance mondiale face à la catastrophe écologique...

Le 6 août, l'urgence est pourtant là avec les premières fuites d'huile lourde. Sans plan d'action face à cette catastrophe inédite et "impensable", il faut d'abord évacuer et transférer animaux et personnes présentes sur l'île : les reptiles à Jersey en lien avec un partenariat technique de l'île anglo-normande, les oiseaux dans le Parc National des Gorges de la Rivière Noire, les chauves-souris dans la Vallée de Ferney, les 4.000 plantes de la pépinière vers Mahébourg et ... huit touristes ! Pour ces derniers, aucun problème d'adaptation, mais pour les autres ? Les vapeurs de l'huile toxique brûlent les yeux des sauveteurs, il est encore difficile aujourd'hui d'évaluer les dommages sur le long terme.

Photos Sources: Mauritian Wildlife Foundation

Quelques marches au bout du débarcadère suffisent à nous conduire sous la canopée endémique reconstituée. Retrouver en un instant le paysage de la forêt côtière primaire est un pur bonheur, un voyage dans le temps. La faune est présente également et je ne tarde pas à croiser Big Daddy, fière tortue d'Aldabra de 105 ans et mâle dominant parmi ses vingt-six congénères. L'idée de présenter les espèces disparues, comme le scinque géant ou le célèbre dodo sous forme de statue de bronze est intéressante et permet de comprendre l'importance de chaque maillon du vivant dans l'écosystème.

La pépinière constitue un lieu central et un conservatoire indispensable, permettant ainsi la réintroduction des arbres endémiques sur l'Ile Maurice et dans les jardins des hôtels en particulier. On y trouve une belle collection de plantes hétérophylles, bois mapou (le "baobab mauricien", toute proportion gardée !), bois de boeuf, bois de rat qui doit son nom au fait que ses fleurs cueillies exhalent le doux parfum d'un rat mort ... L’hétérophyllie, appelée aussi polymorphisme foliaire, est une caractéristique de certains taxons ou plantes, qui produisent des feuilles ou des frondes d'au moins deux types différents, la variation portant le plus souvent sur la taille, la forme, la symétrie, la position ou la fonction. Sur l'île, les jeunes feuilles de ces mêmes plantes présentent des veines rouges, couleur répulsive pour les tortues, surtout celles à long cou, disparues et témoignage de l'incroyable capacité d'adaptation des plantes à leur écosystème.

Photo Sources: Mauritian Wildlife Foundation

Et demain ?

Débuté dans les années 1970, ce projet de sauvegarde d’espèces menacées à l’Ile Maurice a permis de sauver de l'extinction la Crécerelle de Maurice, la Grosse Cateau Verte et le Pigeon des Mares. Mais les efforts doivent perdurer, on comptait plus de 700 "Cardinaux de Maurice" il y a 30 ans, contre quelques 400 aujourd'hui.

Chacun a aujourd'hui repris son poste et les équipes de la MWF sont soulagées et heureuses de pouvoir recommencer leur mission de conservation et de transmission à la population mauricienne dans un premier temps, en cette période de Covid. Les visites constituent d'ailleurs une part importante du budget de fonctionnement. Et il faut le dire, l'État mauricien a assumé tant bien que mal sur ce plan au moins son rôle de soutien ; les entreprises chargées du nettoyage de la côte sud-est ont largement fait appel à la population locale.

Photo Sources: Mauritian Wildlife Foundation

Des ONGs surtout s'investissent pour assurer des formations de reconversion à l'agriculture durable, par exemple, pour les pêcheurs locaux, même si ces derniers ont pu reprendre leur activité le 12 décembre dernier hors le lagon. Mais notons avec Judex Rampaul, Président du Syndicat des Pêcheurs, que peu de pêcheurs locaux sont équipés et formés pour la haute mer, "il faut déjà entre une et deux heures pour atteindre les récifs" sur cette côte où le lagon est grand. Notons également la création récente du programme "Mangrove Watch" visant à la sensibilisation de la population locale à son importance vitale en tant qu'absorbeur de carbone, lieu de reproduction des poissons et source d'alimentation pour la population déshéritée...

Des initiatives positives, mais finalement, nombre de questions restent sans réponses quant aux conséquences sur le long terme, sur la santé, sur la pollution des nappes phréatiques, ... comme une épée de Damoclès. D'ailleurs, un criquet endémique n'a pas été revu sur l'Ile aux Aigrettes depuis la catastrophe ...

Découvrez les eco-tours de la Mauritian Wildlife Foundation aux quatre coins de l’île : https://www.mauritian-wildlife.org/

Et l'agence Moris Otreman pour un séjour engagé à l'île Maurice : https://www.moris-otreman.com/

Sur Babel Voyages : https://babel-voyages.com/fr/acteurs/moris-otreman

Photo Sources: Mauritian Wildlife Foundation Photo Sources: Jacques de Spéville

Mauritian Wildlife Foundation

ONG indépendante qui a pour mission la protection de la flore et de la faune menacée de Maurice et de Rodrigues - vistes et eco-tours au programme

Coordonnées

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[email protected]

https://www.mauritian-wildlife.org/home

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