Par Elodie Mercier
Posté le 7 octobre 2020
Avec un titre aussi évocateur, voire dérangeant pour les passionnés que nous sommes, Rodolphe Christin nous invite à questionner le voyage, à l’heure d’une mondialisation englobante.
Paru en mars 2020, La vraie vie est ici est le dernier essai du sociologue anti-tourisme Rodolphe Christin. À travers cet ouvrage, l’auteur nous partage sa perception du voyage et le sens qu’il lui donne aujourd’hui, dans un monde envahit par le consumérisme de masse.
Rodolphe Christin dresse un constat inquiétant et pourtant évident : les cultures du monde tendent à s’homogénéiser. Là se trouve le plus grand malheur du voyageur parti chercher, ailleurs, l’altérité.
Quel est le but du voyage, sinon la découverte de ce qui est différent ? « Ici » est, par définition, le lieu du connu, quand l’ailleurs laisse le libre cours à l’imagination et un espace infini au rêve. En cela, il attire inexorablement le touriste, comme le voyageur. Pourtant, l’ère de l’anthropocène érode de plus en plus rapidement la diversité naturelle, ou biodiversité, tandis que la mondialisation efface la diversité culturelle. Parallèlement, notre « hyperconnexion » par les réseaux sociaux réduit le champ de l’inconnu, faisant perdre au départ une partie de son intérêt.
Face à ces regrettables conclusions, Christin nous met en garde contre l’industrie du tourisme qui fait du voyage l’antithèse de son essence propre : « Le système touristique […] s’empare de la différence pour la rendre confortable, lisse et propice au repos. ».
Il ne s’agit pas pour autant dans cet essai d’être nostalgiques d’un âge d’or du voyage. Pour l’auteur, le premier des explorateurs lui-même participait de cette logique. En effet, le premier homme à découvrir un lieu est également le dernier à pouvoir l’observer dans son état véritablement originel.
Alors, la vraie vie serait ici ? « La distance est intérieure » indique le titre d’un des chapitres. Ce qui compte dans le voyage, c’est d’abord une démarche de l’esprit vers une rupture de ce qui est connu, une ouverture vers l’extra-ordinaire. Comme le dit Rodolphe Christin avec justesse et pragmatisme : « Après tout, l’ailleurs commence où je ne suis pas, c’est-à-dire à la pointe de ma chaussure. » À méditer...
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