Par Élise Chevillard
Posté le 27 octobre 2020
Saviez-vous que le pastel était extrait des feuilles d’une plante : *isatis tinctoria*, et qu’il fit la richesse de la région autour de Toulouse ? Longtemps disparue, cette tradition du pastel renaît aujourd’hui grâce à une poignée d’artisans et de passionnés qui déclinent le bleu dans leurs créations. C’est le cas de l'atelier AHPY formé par Annette et Yves. Créateur de vêtements uniques, ennoblisseur textile, et formateur, le duo à la vie comme au travail, propose des initiations à l’art de la teinture, ainsi que des cours et stages de couture et de patronage.
C’est au fond d’une petite cour au cœur du quartier des Minimes à Toulouse, qu’Annette Hardouin et Yves Patissier, Maître-artisan en Métiers d’Art, ont installé depuis plus de 15 ans leur atelier de création AHPY Créations Bleu de Pastel (leurs initiales). Tous deux habillés couleur pastel, le ton est donné : il sera bleu. Elle, est styliste et Maître-teinturière ; lui est styliste-modéliste-patronnier-gradeur. De la teinture à la conception, venez découvrir ce patrimoine régional vivant en choisissant l’atelier qui vous correspond.
C’est l’histoire d’un bleu longtemps oublié. Un bleu qui a retrouvé sa couleur ici à Toulouse. Un bleu extrait des feuilles d’une plante : le pastel ou isatis tinctoria, qui s’épanouissait depuis la Renaissance et jusqu’au XVI e siècle dans ce pays de Cocagne comme en son jardin, avant de tomber dans l’oubli.
A ses heures de gloire, le pastel fit la richesse de la ville rose du temps des Capitouls, et était cultivé dans un triangle compris entre Albi, Toulouse et Carcassonne. Sa culture et son commerce disparaîtront progressivement au milieu du 18e siècle, avec l'arrivée de l'indigo des Indes et plus tard avec les colorants de synthèse.
Aujourd’hui, le pastel a retrouvé sa couleur. Aux portes de Toulouse, de nombreux champs aux fleurs jaunes arborent à nouveau cette plante oubliée. Car ici, l’or bleu est avant tout un jaune flamboyant. Ce sont les feuilles qui donneront après extraction ce bleu pastel. En 1994, Denis et Henri Lambert installés à Lectoure vont être à l’origine de cette renaissance. Ce sont eux, qui ont transmis à Annette, tout l’art de la teinture selon des méthodes ancestrales, et les secrets de cette alchimie.
Avant de procéder à la teinture, les feuilles de pastel étaient autrefois malaxées et roulées en boules, appelées cocagnes, ce qui donna naissance à l’expression «pays de cocagne». Elles étaient ensuite séchées et concassées. « Pour deux kilos de poudre bleue, il faut une tonne de feuilles d’istatis tinctoria » nous explique Annette.
Lors d’un stage, découvrez l’histoire du pastel, ses usages, avant qu’Annette ne vous initie à l’art de la teinture dans le petit atelier de teinturier qu’elle a installé au fond d’un jardin. Vous pourrez soit amener votre tissu à teindre, ou bien repartir avec un chèche teint par Annette. « Nous proposons ces ateliers aux curieux qui veulent découvrir autrement le pastel » ajoute-t-elle.
C’est sous forme de poudre fine bleu marine qu’arrive le pastel dans l’atelier AHPY. Le mélange se compose d’eau et de pigment. Les proportions pour que l’alchimie s’opère, elles, restent secrètes. C’est dans les grandes cuves de teinture qu’Annette mitonne sa couleur et fait les démonstrations. Une fois trempé dans le bain, le tissu ressort jaune. Pour que le bleu se dévoile, il faut du temps. Au contact de l’air et grâce à l’oxydation, la couleur se fige. Chaque nouveau bain renouvellera la couleur avant que le tissu ne prenne une teinte bleutée définitive. C’est le tissu qui choisit la nuance de la plus claire à la plus foncée. Le bleu ne déteint pas et conservera sa couleur dans le temps.
Après la teinture, viennent ensuite la conception des modèles et leur réalisation dans l’atelier dédié.
AHPY propose ainsi des formations en patronage modélisme par petits groupes, pour que les stagiaires acquièrent les bases de la réalisation de patrons de vêtements.
Dans cet univers où le bleu domine, les surjeteuses s’alignent avec les machines à coudre. Les dernières créations imaginées et conçues par Annette et Yves habillent les mannequins. Robes, t-shirts, marinières, étoles, pantalons, bérets et même des masques teintés au bleu de pastel. Les pièces en édition limitées sont intemporelles, adaptées à la vie de tous les jours et destinées à être portées année après année. Certains tissus sont teints, d’autres non. « Face à ce bleu, on ne peut rester indifférent, il va à tout le monde et se marie avec beaucoup de couleurs » assure Annette.
Leur fil conducteur ? Des matières nobles cultivées en France et Europe, des tissus (lin, coton, soie, laine) aux fibres naturelles et bio. Toujours dans cette démarche éco-responsable, les chutes de tissus ne se perdront pas et deviendront des œuvres d’arts exposées dans l’atelier !
Vous pouvez retrouver toutes leurs créations sur place, mais aussi dans la boutique Violette et Pastel (Toulouse), et dans les Offices de tourisme, de Moissac à Carcassonne. Envie de poursuivre votre voyage dans le monde du pastel ? Dans le Tarn, à Lavaur, le Château de Magrin abrite le seul musée du Pastel de France et retrace l’histoire de sa culture et de sa prospérité.
Si le pastel est utilisé dans la coloration des textiles, il l’est aussi dans la cosmétique végétal. Les propriétés anti-âges et nutritives de cette plante ne sont plus à prouver ainsi que ses vertus cicatrisantes. A Labège, le spa Terre de Pastel propose des soins de beauté à base d’huile de pastel, ainsi qu’un petit musée. A Toulouse, la boutique Graine de Pastel, propose toute une gamme de crème, huile et savon autour du pastel. Toujours à Toulouse, de nombreux hôtels bâtis à l’âge d’or des marchands pasteliers, entre 1460 et 1560, attestent de son passé florissant, comme l’hôtel de Bernuy, l’hôtel d'Assézat, ou encore l’hôtel Delfau.
Atelier pour s'initier à l’art de la teinture, de la couture et du patronage pour re-découvrir l'ancestral bleu pastel toulousain
05 62 791 791
89 Rue du Caillou Gris, Toulouse, 31200, Occitanie, FR