"Piano to Zanskar", une note heureuse dans l’Himalaya

Culture

Par Sophie Squillace

Posté le 25 décembre 2020

C’est l’histoire d’un homme, d’une montagne et d’un piano. A 65 ans, Desmond O'Keeffe, s’en va dans l’Himalaya indien pour une mission impossible. Mais en Inde, même les rêves les plus fous sont possibles.


Desmond O'Keeffe est un accordeur de piano du quartier de Camden à Londres, connu sous le nom de Monsieur Gentle. Plutôt que de prendre une retraite tranquille, il se lance dans une aventure extraordinaire : livrer un piano dans l’école d’un lointain village bouddhiste, à près de 4 300 m d’altitude. Pourquoi ? Pourquoi pas !

Odyssée musicale

En 40 ans de carrière, il n’a jamais reçu une commande comme celle-ci. Depuis Leh, on plonge dans une aventure romanesque, le long des routes sinueuses à flanc de falaises, jusqu'à ce que la route se termine et laisse place aux chemins de trek et aux cols vertigineux qui mèneront jusqu’au village de Lingshed. Desmond part accompagné de deux jeunes britanniques, sorte d’apprentis à l’enthousiasme contagieux et à l’humour aussi décapant que le sien. Ils devront démonter l'instrument lourd et fragile avec un soin méticuleux, puis transporter les pièces à dos de yaks et avec l’aide d’une solide équipe de ladakhis.

Loin d’être un alpiniste chevronné, Desmond O'Keeffe est un accordeur de piano qui a passé sa vie dans son atelier londonien. Tout au long de cette expédition périlleuse, l’équipée semble avoir la tête dans les nuages. Ces doux-dingues vont se dépasser, tant physiquement que psychologiquement, en traversant les hauts cols d’altitude du Zanskar. La musique envoûtante rythme à merveille les scènes impressionnantes des hommes dévalant les pentes raides des montagnes, en retenant les pièces du piano. On a le souffle coupé par la beauté des paysages et par le suspense, tant le piano semble en péril constant tout au long de ce trek atypique.

Poésie et spiritualité

Bien plus qu’un documentaire sur le thème de l’aventure et la montagne, Piano to Zanskar rappelle parfois l’univers esthétique de Wes Anderson, avec des ambiances toujours très artistiques. Plein d’humour et de poésie, de moments de partage et de rencontre, le film est porté par une musique originale d’Ernst Reijseger et Daniel Sonabend.

Drôle et touchant, Desmond semble vouloir jouer le dernier acte significatif de sa longue carrière, en installant ce piano dans le village le plus haut du monde. Mais c’est bien plus que cela. C’est une sorte de méditation sur le rôle spirituel de la musique, sur le sens de certains défis à accomplir, sur un monde en mutation. Desmond reviendra chaque année dans ce petit village entretenir le piano et donner des cours, avant de décéder à l’automne 2018. Le film lui est dédié.

Ce film britannique de Michal Sulima, découvert en France au Festival International du Film et du Livre d’Aventure de la Rochelle, reçoit un accueil chaleureux dans plusieurs festivals à travers le monde. Il a remporté le Grand Prix du festival du film de montagne de Banff 2020.

Disponible en Anglais sur Filmygorskie.