Par Élise Chevillard
Posté le 10 juin 2024
Sur la mythique Nationale 7, Vienne Condrieu est plus qu’une halte sur la route des vacances vers le Sud. L’ancienne terre romaine regorge de trésors culinaires, viticoles et patrimoniaux. Mais elle a aussi un secret : celui d’un art de vivre tout en calme et en tranquillité. Voici nos meilleures adresses et idées de visites pour découvrir cette terre d'épicurieuses et épicurieux !
À peine 18 minutes de TER depuis Lyon et vous voici déjà à Vienne Condrieu. Face au temple d’Auguste et de Livie, on a comme l’impression d’avoir été transporté au-delà des Alpes, en pleine Italie. Pourtant, on est bien en France, dans l’ancienne capitale de la Gaule romaine.
La ville s'éveille doucement. Les matinaux prennent déjà leur café en terrasse au bar du Temple. On se réchauffe les mains autour d’un café fumant en se laissant emporter par l’histoire de ces pierres millénaires. Les douces couleurs matinales embellissent davantage cet édifice unique, le seul en France avec la Maison Carrée de Nîmes à être encore debout.
Construit par les Romains au Ier siècle et érigé sur l’emplacement du forum, ce Temple fut au fil du temps une église, un tribunal, une bibliothèque et aussi un musée. On peut y entrer uniquement lors de visites guidées. Non loin de là, un mur romain, une tour médiévale et la sculpture monumentale d'une vache en métal témoignent du riche passé de Vienne tout en promettant des découvertes insolites. C'est l'heure justement d'aller se perdre dans ses ruelles.
Photo Sources: Élise Chevillard
Nichée entre l’Isère et le Rhône, Vienne existe depuis le Ve siècle avant Jésus-Christ. Elle fut capitale des Allobroges et seconde ville de Gaule après Rome. Pour découvrir ses secrets, il suffit de se perdre dans ses ruelles, le nez en l’air, avec un guide ou pas. Chaque période a laissé son empreinte au cœur de Vienne, que ce soit dans les pierres, des morceaux de colonnes, des murs d'immeubles... On passe de la cathédrale Saint-Maurice au Temple en quelques petits pas, de ruines romaines à un héritage médiéval.
On poursuit nos déambulations romaines vers le jardin de Cybèle qui abrite le vestige d’un portique du côté oriental du forum. On savoure aussi la fraîcheur du petit cloître caché de Saint André-le-Bas au milieu de ses colonnes en granit, ses petites statues et ses bosquets de fleurs. Dans les ruelles de Vienne, il règne comme un petit air de vacances. Les passants se hèlent joyeusement, on claque la bise facilement, tout le monde se connaît, ou presque.
Photo Sources: Élise Chevillard
On fait aussi de jolies rencontres, comme celle avec Jean-Jacques Dubernard. Cet artisan potier façonne l’argile depuis 1974, perpétuant des gestes millénaires dans son petit atelier de la rue des Clercs. Après une quarantaine d’années passé à Chals dans le Roussillon, il a posé ses céramiques à Vienne. Tous les jours, il est à son poste sur son tour manuel à pédales deux fois centenaire. Il utilise la technique de la terre vernissée et fait aussi sa terre directement à partir d’argile collectée localement.
Dans sa boutique-atelier, véritable caverne d’Ali Baba, se côtoient des bougeoirs en forme de personnages, des figurines animales et le fameux "Chante-pleure", un arrosoir médiéval tout en rondeur à qui il a redonné vie. Jean-Jacques accueille les curieux avec plaisir, partageant histoires et démonstrations de son art ancestral. Il raconte même que Laetitia Casta est venue assister à l’un de ses cours. En atteste sa salopette de travail qui l’attend toujours au porte-manteau...
Photo Sources: Élise Chevillard
Et si on se téléportait en Gaule romaine des Ier et IVe siècles après J-C en visitant le site archéologique du musée gallo-romain ? Il faut emprunter la passerelle depuis le centre de Vienne pour rejoindre à pied ce très beau musée situé sur la rive droite du Rhône, à Saint-Romain-en-Gal. Il fut construit sur l’un des sites archéologiques les plus importants de France. Avec ses grandes baies vitrées s’ouvrant sur le Rhône, ce musée offre une immersion unique dans l’histoire, mettant en valeur des mosaïques et des céramiques d’une finesse exceptionnelle qui décoraient jadis maisons et villas romaines. Il est même possible de visiter l’atelier où s’activent des spécialistes pour remettre en état les fresques. La visite se poursuit à l’extérieur, parmi des ruines qui vous transporteront 2000 ans en arrière.
Le 25 juillet, venez danser ici sur les rythmes endiablés et les folles mélodies de Bulgarie, de Macédoine, de Grèce ou encore de Roumanie ! En écho au célèbre festival de jazz de Vienne, un concert y est organisé au soleil couchant.
À Vienne, la gourmandise est bien loin d'être un vilain défaut, elle est même vivement conseillée ! Car la ville ne compte pas moins de 70 restaurants. De quoi y revenir encore et encore. Berceau de la gastronomie française, Vienne accueille de grands chefs qui ont à cœur de travailler les produits du terroir en revisitant les recettes locales, mais elle héberge aussi des petits restaurants plus intimes.
À l’heure du déjeuner, direction une charmante placette dominée par une tour pour goûter à une spécialité au restaurant l’Estancot. La carte est courte et c’est bon signe. Installé en terrasse, à l’ombre des vieilles pierres, on commande une crique, comprenez une galette de pommes de terre râpées. Vienne y ajoute sa touche personnelle avec des variations de terre, mer mais aussi végétariennes, pour un repas simple mais délicieux. Si votre séjour viennois se poursuit, on notera de manger au Mama Trøtter, qui propose une cuisine zéro déchet au plus près des saisons ou à Alquimia, pour une rencontre franco-paraguayenne dans l'assiette.
Chaque samedi matin, le marché de Vienne rassemble sur plus de 6km de linéaire tout ce que compte la région en produits locaux et gourmands. Il n’est d’ailleurs pas rare de croiser l’un des chefs étoilés du coin venu chercher l’inspiration, Philippe Girardon.
Photo Sources: Élise Chevillard
Sur le domaine de Clairefontaine, souffle comme un parfum de Toscane. Nous sommes pourtant à Chonas-l'Amballan, à 10 km au sud de Vienne. Passé la porte de cette jolie maison bourgeoise encadrée de palmiers et nichée dans un parc de 3 hectares, c’est Laurence, la femme de Philippe Girardon qui accueille les épicurieux et les conduit dans l'ancien salon de musique familial pour le déjeuner.
Philippe Girardon a développé son art culinaire au fil des années, en travaillant aux côtés de grands noms de la cuisine française, affinant son savoir-faire avant de s'installer au Domaine de Clairefontaine. Pour acheter ses produits, le Chef ne dépasse jamais les 36 kilomètres à la ronde dans un souci d’économie circulaire. Par exemple, les légumes et fruits proviennent d'un jardin situé à seulement 800 mètres de l'établissement sur le plateau de Chonas, les herbes aromatiques sont cultivées dans son jardin, les viandes issues des fermes locales, et les poissons sont pêchés dans les rivières et lacs voisins. Philippe Giradon, fait aussi son beurre, son miel et élève des poules.
Ses inspirations ? Le terroir de l’Isère et ses rencontres au marché de Vienne. La réputation de Philippe Girardon ne se limite pas à son étoile Michelin. Il a également été sacré Meilleur Ouvrier de France en 1997. Au menu ce midi : eau de tomate en son éprouvette, pâté en croûte de cochon fermier, et fleurs de courgettes farcies d’un soufflé de brochet de pêche locale. Sur le plateau de fromages, on trouvera la rigotte de Condrieu, le Saint-Marcellin, le Saint-Félicien ou encore le bleu du Vercors-Sassenage. Pour accompagner les plats, les vins de Condrieu et de Côte-Rôtie se disputent la carte. Et en digestif, on goûte à la célèbre eau-de-vie de poires. Justement, on vous emmène là où elle est fabriquée, à Villette-de-Vienne.
Photo Sources: Élise Chevillard
Pour s’y rendre, il faut faire quelques kilomètres vers le nord de Vienne. On raconte que la célèbre eau-de-vie de poire est née ici, à la Maison Colombier, du temps de son premier propriétaire Joannès Colombie. C’est Stéphane Jay et sa femme qui ont repris cette exploitation et distillerie en 2005 et qui continuent de perpétuer ce savoir-faire. Ce verger unique de poire William est composé d’arbres âgés de plus 120 ans. En vous y promenant, vous risquez de croiser des poires dans des bouteilles. Lors d’une visite guidée, Stéphane se fera un plaisir de tout vous expliquer et de percer le secret de ces poires emprisonnées dans leurs flacons d’eau-de-vie. Car ce savoir-faire requiert... un peu de bouteille ! À chaque printemps, lorsque les fruits sont tout juste formés, ils sont glissés dans les bouteilles accrochées sur les arbres. Une fois à maturité, les poires prisonnières sont alors récoltées à la main. Après nettoyage, la carafe qui contient le fruit est remplie d’eau-de-vie de poire Williams.
En plus des liqueurs, la Maison Colombier propose aujourd’hui une large sélection de produits à base de poire : poiré, jus de fruits, pâtes de fruits, chocolats ou encore sorbets.
Photo Sources: Élise Chevillard
On dit de Vienne qu’elle est la porte d’entrée du Sud. Une chose est sûre, le Sud est accessible à vélo par la ViaRhôna. Cette route relie le Léman à la Méditerranée en 815 kilomètres, dont 260 entre Vienne et Avignon. L’Office du Tourisme propose des vélos mécaniques ou électriques à la location pour une demi-journée ou à la journée. Et pour ceux qui veulent aller plus loin, l’Office a lancé en 2023 un service clés en main qui propose des transferts de bagages sur chaque étape de l’itinérance.
C'est l'heure d'enfourcher sa monture pour partir le long de la ViaRhôna ! Cette aventure à deux-roues relie Vienne à Condrieu, en passant par la plaine d’Ampuis et la réserve naturelle de l’île du Beurre. Serpentant entre fleuve et vignobles en terrasse, la route lisse et droite se laisse facilement dompter. Le Rhône d’un côté, les vignes de l’autre, on file le nez au vent, sans oublier de faire un stop à la guinguette d’Ampuis pour recharger ses « batteries » ! La route s’écarte ensuite du fleuve et plonge dans la campagne.
Sanctuaire de la biodiversité rhodanienne, écrin de verdure préservé, l’île du Beurre se veut un site d’observation pédagogique de la faune et de la flore qui vivent le long du Rhône. À ses abords, la piste cyclable utilise un revêtement écoresponsable composé de graviers locaux et d’un produit d’origine végétale issu de l’industrie papetière. Pied-à-terre, on prend le temps de flâner sur le sentier d’interprétation avec un guide... ou pas ! Depuis les postes d'observation et selon les saisons, peut-être croiserez-vous des hérons cendrés, des grands échassiers en pleine nidification, des martins-pêcheurs ou encore des grèbes castagneux. Mais la star de l'île du Beurre, c'est le castor, beurre étant le nom qui lui était donné autrefois.
Photo Sources: Élise Chevillard
Oublier son mode de transport, se déplacer sans effort et se laisser porter par les paysages et les explications de votre guide dans l’oreillette, c’est le concept du cyclodebout, inventé et fabriqué en Haute-Loire. Près de Condrieu, François et Céline de Mobilboard, proposent des balades (encadrées ou en location libre) en fonction des envies, du niveau... mais aussi des vins !
Vous êtes plutôt Saint-Joseph ? Alors direction la Loire. Pour les amateurs de Condrieu ou de Côte-Rôtie, c’est dans la Vallée du Rhône que ça se passe. À la frontière entre le vélo, la trottinette et le gyropode, cette mobilité douce 100 % électrique est accessible à tous. Sans selle, il s’utilise debout. Pas besoin de mettre pied à terre pour s’arrêter. Une formation d’environ 15 minutes est nécessaire pour le prendre en main, après ça roule tout seul ou presque ! On se faufile partout dans les rues de jolis villages, on longe les bords du Rhône. Un petit coup d’accélérateur pour attaquer les hauteurs et vous voilà en plein cœur des parcelles de vignes. La récompense ? La dégustation de vins, car François et Céline sont aussi cavistes. Avec Mobilboard, on peut aussi louer des vélos et des gyropodes !
Photo Sources: Élise Chevillard
On l’a vu, Vienne Condrieu est une terre de vin. Sur une centaine d’hectares répartis sur 7 communes au pied des pentes du massif du Pilat, on y cultive les appellations Côte-Rôtie et Condrieu. Sur le domaine du Corps de Loup, au nord de Condrieu, la vigne pousse en terrasse sur des collines escarpées chauffées par le soleil. Contemplant le Rhône et sa Lône, le domaine propose de découvrir le vignoble, son histoire et ses caves.
Autre grand lieu du vin : la Maison Guigal. Située dans le village d’Ampuis, la Maison, forte de trois siècles d'expérience, a décidé de partager sa passion avec les visiteurs. À l'intérieur de la bâtisse, des espaces dédiés aux amateurs de vin, appelés le "Caveau du Château", ainsi qu'un musée, ont été aménagés. En collaboration avec le musée gallo-romain de Saint-Romain-en-Gal, la famille Guigal a aussi créé une exposition retraçant l'histoire des vignobles et des vignerons de la vallée du Rhône depuis l'Antiquité et à travers de nombreux objets : amphores, futs...
Cépage rime aussi avec jazz ! Chaque vendredi, les Wine Notes vous donnent rendez-vous dans un domaine viticole pour un concert de jazz ou un spectacle de danse, suivi d’une dégustation en blanc et rouge.
Photo Sources: Élise Chevillard
Construit entre 40 et 50 après J-C, le théâtre antique de Gaule épouse la forme en hémicycle de la colline de Pipet à laquelle il est adossé. Ce monument, dédié au divertissement et à la gloire de Rome, est l'un des plus importants vestiges de toute la Gaule romaine, tombé dans l’oubli et redécouvert au début du XXe siècle après des déblaiements et travaux de restauration. Aujourd’hui, si ses gradins ne se sont plus recouverts de marbre et que d’autres applaudissements et rumeurs ont remplacé les combats de gladiateurs, le théâtre antique continue de faire venir les foules.
Connu pour être la scène mythique du Festival de Jazz, il accueille des artistes de renommée mondiale pour mettre toutes les notes à l’honneur : gospel, blues, soul, funk, ethnique. La 43e édition aura lieu du 27 juin au 16 juillet 2024. Cette année, ce sont Ibrahim Maalouf, Caravan Palace, Asaf Avidan, Rhoda Scott, Vulfpeck ou encore Léon Phal qui feront résonner les vieilles pierres de ce théâtre. Magique au soleil couchant ! De quoi se faire la promesse d’y revenir.
Photo Sources: Élise Chevillard