Par Babel Voyages
Posté le 21 avril 2021
Première industrie mondiale, le tourisme engendre des richesses économiques dans les pays du monde entier. En 2019, l'OMT (Organisation mondiale du Tourisme) a enregistré 1,5 milliard d'arrivées de touristes internationaux à l’échelle mondiale. Si le tourisme de masse peut participer au développement économique des pays, il peut aussi avoir des effets néfastes sur les villes, les populations, l’environnement… La contrepartie en vaut-elle vraiment la chandelle ? Face au trop-plein de touristes, que faire ?
Première industrie mondiale, le tourisme engendre des richesses économiques dans les pays du monde entier. En 2019, l’Organisation mondiale du Tourisme (OMT) a enregistré 1,5 milliard d'arrivées de touristes internationaux à l’échelle mondiale. Si le tourisme de masse peut participer au développement économique des pays, il peut aussi avoir des effets néfastes sur les villes, les populations, l’environnement… Face à ce paradoxe et à la sur fréquentation de nombreux sites touristiques à travers le monde, que faire ?
Le secteur touristique constitue l’un des défis majeurs du XXIe siècle. Toujours plus informés sur les conséquences du tourisme de masse et sensibilisés au développement durable, les voyageurs formulent depuis plusieurs années la demande d’un tourisme plus responsable.
Au XVIIe siècle, le tourisme était une pratique réservée aux élites et se limitait aux contours de l’Europe. Depuis l’ère industrielle, il s’est démocratisé et a progressivement conquis nos sociétés au XXe siècle. A mesure que le tourisme s’est développé, des excès et des dérives sont apparues.
Le concept de tourisme de masse est né dans les années 1960. Avec la généralisation des congés payés, les Français ont commencé à partir en vacances en prenant d’assaut certaines destinations telles que la côte normande (Deauville, mont Saint-Michel) ou la côte méditerranéenne (Nice, Marseille, Cannes…). C’est aussi l’époque à laquelle on construit des stations de ski, balnéaires ou thermales, aux paysages défigurés par des barres d’immeubles en béton et des remontées mécaniques.
On garde tous en tête les constructions typiques de ces années-là, les stations comme la Grande Motte au bord de la mer, ou les Menuires à la montagne. L’attractivité des prix pratiqués par l’aviation civile et les agences de voyages, entre billets d’avion des compagnies low cost à 40 € et croisières « tout inclus » pour faire le tour du monde ou pour des séjours plus courts, font partie des raisons qui ont permis de façonner ce tourisme de masse, et qui continuent de se développer aujourd’hui.
D’après l’OMT (Organisation mondiale du Tourisme), « 95 % des touristes mondiaux se concentrent sur moins de 5 % des terres émergées ». Ces chiffres sont révélateurs de ce qu’est le tourisme de masse. Aujourd’hui, nous sommes nombreux à choisir les mêmes destinations et à partir toujours plus pour étancher notre soif de voyage. Un choix qui a des effets néfastes sur les territoires, mais aussi les populations qui y vivent et les espaces naturels.
Un choix également très paradoxal pour le voyageur lui-même qui vit une expérience de moins en moins riche et authentique. Car le touriste, que veut-il pour ses vacances ? Voyager dans un endroit pas trop touristique. Qui n’a pas entendu un touriste se vanter à son retour de voyage : « C’était super car nous étions tout seuls, il n’y avait pas d’autres touristes ! »
Le tourisme de masse est présent des temples cambodgiens d’Angkor aux grands parcs nationaux nord-américains, en passant par les grandes villes européennes comme Paris, Barcelone ou encore Venise.
Taj Mahal, Machu Picchu, temples d’Angkor, centres-villes européens comme Venise et sa place Saint Marc, ces sites touristiques souvent classés au patrimoine mondial de l’Unesco accueillent beaucoup trop de visiteurs par jour. Des conséquences accentuées aujourd’hui par le partage d’images et d’expériences vers les mêmes merveilles sur les réseaux sociaux.
Le tourisme de masse se limite à certains sites connus d’une destination et se distingue par son rythme furtif. C’est-à-dire que le touriste vient par exemple visiter en coup de vent une ville ou un site, comme pour cocher sur sa liste les endroits qu’il veut se dépêcher de voir avant de mourir.
Le tourisme de masse touche également les villes européennes. C’est un désastre pour les populations locales. Barcelone, Venise (trente millions de visiteurs - pour 55 000 habitants - ont déferlé en 2019), Dubrovnik ou Paris voient défiler des millions de visiteurs par an au point que ses habitants ne se sentent plus chez eux.
À cause de la flambée des prix de l’immobilier due à l’accroissement du tourisme, ils désertent les grandes villes, les centres, incapables de se loger. Les commerces de proximité ferment remplacés par des boutiques touristiques, les transports en commun sont engorgés, le patrimoine se dégrade... On parle parfois de sites « muséifiés », lorsque l’on évoque les villes et leurs habitants étouffés par l’augmentation des loyers, avec la puissance des nouvelles plateformes touristiques comme Airbnb. On parle même dans certains endroits de l’apparition d’une sorte de « tourismophobie ».
Mais la plus grande faiblesse du tourisme de masse est de ne pas respecter les principes du développement durable, sur lesquels se fonde le tourisme responsable. Le tourisme de masse est avant tout un vrai désastre pour l’environnement, les espaces naturels, mais aussi le patrimoine culturel. Des sites sont aujourd'hui menacés, comme les tombeaux d’Égypte, le Macchu Picchu, l'île de Pâques, les temples d'Angkor, le Kilimandjaro, le Mont Blanc ou encore les Galapagos.
L’un des exemples les plus frappant des dérives du tourisme de masse sur l’environnement concerne le mont Everest au Népal. Depuis les pionniers du début des années 1950, nombreux sont ceux à vouloir conquérir le « toit du monde ». Si bien qu’à la difficulté extrême de l’ascension s’ajoutent aujourd’hui celles de la pollution et de la surfréquentation.
À l’échelle mondiale, le tourisme de masse pollue la planète (avions, paquebots de croisière). Et il est aussi un danger pour les espèces animales, notamment les selfies qui mettent des animaux sauvages en danger. Que faire des dizaines de millions de croisiéristes voguant sur leurs monstres des mers chaque année.
La crise sanitaire du Covid-19 a complètement bouleversé le secteur touristique, en accélérant sa transformation. On peut se réjouir de voir une reprise plus réfléchie et la nécessité d’un tourisme durable. Car depuis la pandémie mondiale, les désirs des voyageurs ne sont plus les mêmes. Voilà une belle opportunité pour mettre en fin aux dérives du tourisme de masse et attendre des professionnels du tourisme de s’engager tous ensemble pour un tourisme responsable.
On voit apparaitre des solutions de la part des politiques touristiques, notamment sur la régulation de la fréquentation des sites touristiques. Pour lutter contre le sur-tourisme, plusieurs sites à travers le monde ont désormais restreint leur accès. Certains choisissent d’augmenter le prix du droit d’entrée pour limiter le nombre de visiteurs, d’imposer une taxe ou de restreindre tout simplement le nombre de visiteurs par jour. Les sorties en mer aux îles Galapagos sont régulées et seuls quelques sites sont autorisés.
Le Machu Picchu accueil des visiteurs seulement lors de deux visites quotidiennes. La Thaïlande est allée plus loin en interdisant l’accès de certaines îles menacées, le temps que la nature et la biodiversité reprennent vie.
En Asie, un pays lutte de manière exemplaire contre le tourisme de masse : le Bhoutan. Le royaume a depuis le début de son ouverture aux étrangers imposé une politique stricte en matière de tourisme, avec un prix élevé journalier pour chaque visiteur. En faisant ce choix, les retombées économiques du tourisme sont généreuses et le flux de visiteurs maitrisé.
Pour beaucoup, impossible de se passer de voyager. Alors pour continuer, il faut repenser notre manière de le faire, s’y prendre autrement et adopter un comportement plus durable. Par exemple, partez hors-saison et pensez au vélo ou au bus, évitez les zones urbaines, les grandes villes, choisissez des destinations moins populaires, moins connues… Pour éviter le tourisme de masse, les lieux bondés de monde, tournez-vous vers l’éco-tourisme, un tourisme authentique et pensé dans le respect de l’environnement, des populations locales et de la découverte de la nature.
Grâce à des initiatives de tourisme participatif, on peut montrer d’autres manières de découvrir une ville. Il n’y a pas que la place Saint Marc à Venise ! La cité cache bien des trésors qui permettent d’attirer l’attention des visiteurs. Des expériences avec des guides locaux ou des « greeters » peuvent changer la donne, en donnant l’opportunité à des voyageurs de passage de voyager autrement, d’avoir un autre regard sur la ville et la manière dont ils la visitent. De se rappeler que si l’on va tous vers les mêmes merveilles à travers le monde, c’est parce qu’elles sont belles et qu’elles ont une âme.
Le tourisme de masse a eu beaucoup de succès grâce à des coûts toujours plus faibles, notamment avec la démocratisation du prix des moyens de transport et l’apparition des vols low cost. Paradoxalement à ses conséquences désastreuses, ce tourisme de masse a donné l'accès du plus grand nombre aux vacances. Il est donc difficile de s’y opposer pleinement. Surtout quand on pense aux nouveaux marchés émergents, aux classes moyennes asiatiques ou d’Amérique latine qui aujourd’hui reproduisent nos façons de « consommer le voyage » dans la deuxième partie du XXe siècle.
Le tourisme de masse n’a donc pas que des inconvénients, même s’il est urgent de lutter contre ses effets indésirables. Le tourisme de masse est largement questionné et, s’il ne peut disparaitre, il peut se transformer, et s’inscrire dans une recherche de durabilité. Aujourd’hui, « l’homotouristicus » est toujours plus éduqué aux effets du tourisme de masse. Il s’ouvre à un tourisme plus vert et responsable, et oriente le marché touristique actuel vers une nouvelle offre touristique durable.